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LES DÉFIS CACHÉS DU GÉNÉALOGISTE : ENTRE PATIENCE ET PERSÉVÉRANCE

Dernière mise à jour : 1 mars

"Le doute est à la base même du savoir, puisqu'il est la conditions essentielle de la recherche de la vérité" Jean-Charles HARVEY (1891-1967)

J'entends souvent dire que la généalogie n'est qu'un loisir et que, grâce à la numérisation et aux avancées de l'intelligence artificielle, il deviendra de plus en plus simple de créer son arbre généalogique à l'avenir. C'est peut-être vrai d'une part, la numérisation est un outil formidable, elle nous permet d'accéder à des millions de registres et cela va aider considérablement les personnes n'ayant pas les moyens de se déplacer. D'autre part, je pense que même avec l'avancée de la technologie, les recherches demanderont toujours une réflexion humaine et que la technologie sera un formidable outil de décryptage tout au plus.


I - LA DIFFICULTÉ D'ACCÈS AUX SOURCES


Le premier obstacle majeur dans la recherche généalogique est l’accès aux sources. De nombreux documents, qu’il s’agisse de registres d’état civil, d’actes notariés ou d’archives paroissiales, sont parfois difficiles à localiser ou à consulter. Dans certains cas, ces archives ont été déplacées, abimées ou même détruites lors d’événements historiques tels que des guerres ou des catastrophes naturelles. La frustration de savoir qu’une piste prometteuse est inaccessible est une réalité récurrente pour nous.


En Italie, par exemple, les actes d’état civil antérieurs à 1866 sont souvent conservés au sein des paroisses et n’ont pas toujours été numérisés, ce qui impose des démarches administratives complexes et des déplacements. Certains diocèses possèdent des archives pouvant aller jusqu'en 1550 ou plus alors que d'autres n'auront que des archives de la période de la restauration (1815-1859).


D'autant plus, que les paroisses sont très réticentes sur l'accès aux archives. Je me confronte souvent à cette réticence en Italie (aussi bien dans le Nord que dans le Sud). Je fais face également à des coûts disproportionnés lorsque j'ai besoin ne serait-ce que d'un simple document d'archive :


  • Récemment j'ai fait la demande dans le Sud de l'Italie pour obtenir la fiche de matricule militaire d'un arrière grand-oncle. Cependant, rien n'est numérisé, je ne sais pas où il a fait son service. Je décide donc de faire la demande aux archives d'Etat en donnant toutes les informations en ma possession. Ce matricule militaire m'a été envoyé en format numérique, il tient sur deux pages et il m'a été facturé 14€. Ce qui en France est totalement gratuit depuis chez soi...


    Pour le compte d'un client, j'ai fait une demande concernant une personne en particulier. Je voulais avoir l'acte de naissance, mariage et décès d'un de ses arrière-grands-pères. L'archive voulait me facturer 30€ par acte soit 90€ pour les trois actes.


    Imaginez devoir dépenser tout cet argent pour des recherches généalogiques surtout quand vous n'avez aucune information sur votre famille d'origine d'autant plus qu'en généalogie il faut croiser les informations pour ne pas faire fausse route (voir grand II pour voir les problème récurrents en généalogie).


  • Les communes italiennes ne délivrent plus les copies intégrales ou extraits avec filiation. Elles ne délivrent que des certificats d'état civil. Ces certificats sont uniquement une preuve que telle ou telle personne est bien née ou morte dans cette commune. Rien de plus. Par ailleurs, ils ne délivrent ces certificats uniquement si on leur donne la date exacte de l'acte. Ce qui est totalement absurde puisque nous n'avons pas toujours l'information !



II - Les secrets de famille, les erreurs, les homonymes


Le généalogiste se pose de nombreuses questions, parfois même un peu trop. Pour ma part, j’essaie toujours de trouver des réponses à chacune d’elles. C’est une obsession qui fait partie intégrante de notre passion.


A) Les secrets de famille

Voici deux questions auxquelles j’ai été confronté :


  • Pourquoi mon arrière-arrière grand-père est enterré à Nice Ouest et mon arrière-arrière-grand-mère à Nice Est ?

Cette question je me la suis posée pour un couple d'arrière-arrière-grands-parents. Lors de mes recherches, je découvre qu'ils ont eu six enfants, qu'ils ont toujours été mariés. Aucune trace de divorce. Et pourtant, mari et femme ne sont pas enterrés dans le même cimetière.


Je découvre que mon arrière-arrière-grand-père est enterré avec une famille inconnue aux bataillons. Je me lance donc à la recherche des personnes enterrées avec mon aïeul. Rien. Je remonte dans l'arbre, aussi bien en lignée directe qu'en lignée indirecte. Je vérifie les également si mon aïeul était un parrain d'une de ces personnes. Rien non plus.


Mon arrière-arrière-grand-mère quand à elle est enterrée dans un autre cimetière dans le tombe familiale de son père. On y retrouve ses parents, deux de ses frères et ses belles-soeurs.


Je décide donc de questionner les petits-filles qui ont respectivement 82 ans et 79 ans (des cousins germaines). C'est là que la première m'annonce qu'elle n'a jamais su qui était la famille dans la tombe de son grand-père, qu'elle ne s'est jamais posée la question. Je questionne la deuxième et elle m'apprend qu'il s'agit d'une tombe d'amis de la famille de son père. Je lui demande donc pourquoi. C'est là que j'apprends que la famille de mon arrière-arrière grand-mère était opposée à ce que mon arrière-arrière grand-père soit enterré avec eux DONT MON ARRIÈRE-ARRIÈRE GRAND-MÈRE. J'apprends également que mes arrière-arrière-grands-parents étaient violents entre eux au point de ne pas vouloir être enterrés ensemble. D'où l'importance des témoignages oraux de nos parents et grands-parents.



  • Un SDF de "bonne famille" ?


Je me suis posé la question concernant un fils d'une cousine germaine de mon arrière-grand-mère. La cousine germaine de mon arrière grand-mère avait deux enfants : Félix et Julien. La mère de Félix et Julien travaillait dans une épicerie et le père était gendarme.


L’histoire concerne Félix, né en 1914 et décédé en 1944, tué par les Allemands dans les Alpes-de-Haute-Provence. En explorant son passé, je découvre une jeunesse mouvementée : des articles des années 1930 rapportent plusieurs condamnations pour vols dans les Alpes-Maritimes et en région parisienne. Ces mêmes articles le décrivent comme un sans-domicile-fixe, ce qui m’a intrigué.


Pour comprendre, je décide de retrouver les descendants de Félix. Grâce aux réseaux sociaux, je localise une petite-fille. Nous partageons la même lignée familiale : nos arrière-arrière-grands-pères étaient frères. Après lui avoir présenté mes recherches, elle me confie que son grand-père, qu’elle n’a jamais connu, avait été abandonné par ses parents, en particulier par sa mère (la cousine germaine de mon arrière-grand-mère). Cette dernière aurait porté toute son affection sur Julien, le deuxième fils, allant même jusqu’à être enterrée avec lui.


Cependant, elle ne connaît pas les raisons exactes de l’abandon de Félix par sa mère. Affaire à suivre...


B) Les erreurs volontaires ET INVOLONTAIRES

Je vais ma répéter, mais notre soucis permanent en généalogie est d'être sûr que votre aïeul est bien le fils de Monsieur X et Madame Y. Il faut donc rapporter le maximum d'informations.


  • Un recensement trompeur


Cet été pour le compte d'une cliente, j'ai effectué des recherches pour sa famille maternelle originaire de Vénétie ayant migré en région parisienne au début de années 1930. Ma cliente me livre toutes les informations possibles sur sa lignée directe et indirecte. Je retrouve un recensement de Gagny en 1931 concernant sa famille maternelle.


Recensement Gagny 1931. Archives départementales de la Saine Saint Denis
Recensement Gagny 1931. Archives départementales de la Saine Saint Denis

Dans ce recensement, on peut noter que POLESEL Attilio serait le père de :


  1. POLESEL Sigismond

  2. POLESEL Emile

  3. POLESEL Antoine

  4. POLESEL Joséphine


Et serait le grand-père de :


  1. POLESEL Olivia


Ce n'est pas le cas pour POLESEL Joséphine. En effet, POLESEL Émile, le grand-père de ma cliente, est né en 1908, tout comme POLESEL Joséphine. À première vue, on pourrait penser qu'elle serait sa sœur jumelle. Cependant, cela ne peut pas être le cas, car il est clairement indiqué qu'Émile est né à Gaiarine, tandis que Joséphine est née à Parallo. Après vérification et concertation avec ma cliente, il s'avère que Joséphine n'est pas la sœur d'Émile, mais sa belle-sœur, mariée à Antoine.


  • Une épouse qui change de prénom sur les actes


Un autre point de vigilance des généalogistes est la modification des prénoms dans les actes. J'ai eu le cas concernant une arrière-arrière-grande-tante par alliance.


Archives départementales des Alpes-Maritimes
Archives départementales des Alpes-Maritimes

Archives départementales des Alpes-Maritimes
Archives départementales des Alpes-Maritimes

Acte de mariage de ICART Charles et DALAISE Augusta Emilie Clotilde en 1899.









Acte de vente de Charles ICART en 1928. Dans cette acte de vente, l'épouse de Charles est DALAISE "Yvonne."





Après vérifications, il s'agit bien de la même personne, seulement elle était surnommée Yvonne (les notaires n'étaient pas très regardant à l'époque). Là encore, Yvonne aurait très bien pu être une soeur d'Augusta qui aurait contracté mariage avec son beau-frère après le décès de cette dernière. Une pratique très courante autrefois.


  • Une mère qui change de nom de famille sur les actes


Au cours de mes recherches personnelles, j'ai découvert un ancêtre, un arrière-arrière-arrière-grand-père nommé GUIDO Augustin. Il est né le 21 juillet 1856 à Tende de Antoine et BOIN Marguerite.


Il s'est marié pour la première fois le 5 juillet 1883 à Tende avec BONFRE Anne-Marie. L'acte de mariage confirme qu'il est bien le fils d'Antoine et BOIN Marguerite.


Sa femme décède le 24 juillet 1898.



Acte de naissance de Guido Agostino 1856. FIls de Antoine et BOIN Marguerite
Acte de naissance de Guido Agostino 1856. FIls de Antoine et BOIN Marguerite
Acte de mariage Guido Agostino et Bonfrè Anna Marie 1883. Agostino fils de Antoine et BOIN Margherita
Acte de mariage Guido Agostino et Bonfrè Anna Marie 1883. Agostino fils de Antoine et BOIN Margherita

Il se remarie le 10 novembre 1899 avec GUIDO Jeanne. Dans cet acte, il est indiqué qu'il est le fils d'Antoine et de CABAGNO Marguerite.


Est-ce une simple erreur ?


Il décède à 86 ans le 17 décembre 1942 à Tende. Son acte de décès mentionne également qu'il est le fils d'Antoine et de CABAGNO Marguerite.


Second Mariage de Guido Agostino en 1899. Mentionné fils de Antoine et CABAGNO Marguerite. Source : Archives départementales des Alpes-Maritimes
Second Mariage de Guido Agostino en 1899. Mentionné fils de Antoine et CABAGNO Marguerite. Source : Archives départementales des Alpes-Maritimes
Acte de décès Guido Agostino en 1942. Fils d'Antoine et CABAGNO Marguerite. Source : Archives Municipales de Tende
Acte de décès Guido Agostino en 1942. Fils d'Antoine et CABAGNO Marguerite. Source : Archives Municipales de Tende

Comment ai-je résolu cela ?


Tout d'abord, j'ai vérifié qu'il n'existe pas de jugement rectificatif de l'état civil de BOIN Marguerite. J'ai aussi vérifié que BOIN Marguerite ne s'était pas remariée après 1873, année du décès de son mari GUIDO Antoine, avec un certain monsieur CABAGNO. Je n'ai rien trouvé à ce sujet non plus.


J'ai donc recherché l'acte de baptême de BOIN Marguerite. Elle a été baptisée le 10 juin 1833 de François et SERRATORE Jeanne (comme mentionné dans l'acte de naissance de son fils GUIDO Augustin). L'acte de mariage entre BOIN Marguerite et GUIDO Antoine existe bel et bien. Ils se sont mariés le 19 août 1856, un mois après la naissance de leur fils Augustin (cas assez rare pour l'époque). Cet acte me confirme bien qu'elle est la fille de François et SERRATORE Jeanne.


Enfin, j'ai cherché l'acte de décès de BOIN Marguerite dans les registres de Tende entre 1873 (date de décès de son mari) et 1935. Je ne l'ai pas trouvé. Je n'ai pas trouvé non plus dans les villages voisins. Aucune trace de testaments non plus. J'ai effectué les mêmes recherches pour CABAGNO Marguerite. En vain.


J'ai finalement accordé ma confiance aux actes de naissance/baptême, les seuls documents pouvant faire foi. Augustin est selon moi le fils de BOIN Marguerite et non de CABAGNO Marguerite.



C) LES HOMONYMES

Les homonymes sont monnaie courante surtout dans les villages italiens. Il faut savoir qu'en Italie, nos ancêtres n'étaient pas créatifs pour nommer leurs enfants. Vous n'aurez jamais un ancêtre avec un prénom, un deuxième et troisième prénom. Voici un aperçu des tables de mariages à Vernante (Province de Cuneo)



Table des mariages de 1872 de Vernante (Coni). Source : Antenati
Table des mariages de 1872 de Vernante (Coni). Source : Antenati
Table des mariages 1873 de Vernante (Coni). Source : Antenati
Table des mariages 1873 de Vernante (Coni). Source : Antenati





















Dans ce village, on remarque une très faible diversité des noms de famille : DALMASSO, CORDERO, GIORDANO, CARLETTO, BERTAINA, PETTAVINO, BODINO, VIALE, et VALLAURI. Cela conduit souvent à des mariages entre membres de ces mêmes familles, ce qui peut compliquer considérablement la recherche généalogique.


Par exemple, je suis l’arrière-arrière-arrière-arrière-petit-fils de DALMASSO Nicolao et VALLAURI Maddalena. En recherchant leurs enfants, je suis tombé à plusieurs reprises sur trois autres couples portant exactement les mêmes noms, ou des variations comme Maria Maddalena, vivant à la même période !


Alors, comment s’y retrouver ? La filiation seule ne suffit pas toujours. Il faut être très attentif à plusieurs détails : l’âge des parents au moment de la naissance de leurs enfants, leur hameau d’origine, et il est crucial de comparer avec les informations déjà en votre possession.


Pour faciliter l’identification, ces villages italiens ont fini par attribuer des surnoms aux familles, afin de mieux les distinguer. Un exemple concret concerne les DALMASSO. Dans chaque acte de décès, on retrouve non seulement le nom et le prénom de la personne, mais aussi sa filiation et un surnom souligné pour identifier précisément la branche familiale.


Table décès 1905. Source: Antenati
Table décès 1905. Source: Antenati
Table décès 1905. Source : Antenati
Table décès 1905. Source : Antenati



















Naissances 1887. Source : Antenati
Naissances 1887. Source : Antenati
Naissances 1887. Source: Antenati
Naissances 1887. Source: Antenati


























En 1887, toujours dans les DALMASSO, on peut noter la naissance de :


Anna de Nicolao

Nicolao de Nicolao

Maria de Nicolao

Maria de Nicolao

Nicolao de Carlo

Nicolao de Antonio

Margerita de Nicolao

Lucia de Nicolao


Ou encore :


Giacomo de Thomas

Giacomo de Giacomo

Matteo de Giacomo

Maria de Giacomo

Giacomo de Giacomo

Lucia de Giacomo



 
 
 

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